- Madame La Présidente, mesdames et messieurs,
- Je m’appelle Laurent LAMY, je suis ingénieur réseau en informatique, et j’avais 6 ans de plus que mon frère Éric qui est décédé dans ce crash.
- Je fais partie des membres fondateurs de l’association E&S AF447 depuis ses débuts en juillet 2009. J’ai commencé très vite à m’intéresser à la localisation de l’épave et aux raisons de ce crash car il m’était insupportable de ne pas comprendre la disparition de mon frère.
- Alors, j’ai commencé à lire beaucoup sur internet, les forums spécialisés en aéronautique tout d’abord, puis beaucoup de rapports d’accidents, les directives de nombreux états, certaines parties du CS25 et du dossier judiciaire. Je me suis rendu également à plusieurs colloques de la sécurité aérienne et j’ai rencontré beaucoup de professionnels, de l'aéronautique principalement, qui avaient proposé leur aide à l’association.
- Je suis donc naturellement à l’origine d’une très grande partie des demandes d’actes rédigées par l’association à destination des juges d’instruction en 2011, 2013, 2014 et 2017 ; j’ai également avec Henri MARNET CORNUS un de nos conseillers techniques apporté les éléments techniques qui ont permis aux avocats de notre association de rédiger le mémoire en réponse à l'ordonnance de non-lieu du mois d’août 2019.
CONTEXTE
- A cet effet, je suis déçu par le fait que nos demandes soient restées très majoritairement sans suite. Elles portaient principalement sur les conséquences de la modification des PHC et FWC, sur le retard d’apparition du message NAV ADR DISAGREE à l’ECAM et sur la recrudescence des problèmes de Pitot Thalès AA..
- Une 1ère contre-expertise a été réalisée à la demande d’Airbus ; je crois me souvenir que les conclusions de la 1ère enquête ne les satisfaisaient pas. Une pseudo reconstitution avait été intégralement organisée, financée et on peut dire orientée par Airbus, raison pour laquelle l’association avait demandé son annulation. Je me souviens qu’il ressortait de cette expertise que les pilotes avaient été "mauvais", pour reprendre le terme du Figaro de l’époque (propriété d’Airbus à l’époque). Mme Kheris en février 2015 justifiait l’absence de réponse à nos demandes d’acte par le fait que nous avions déjà réalisé ces demandes, qu’elle estimait donc que la justice y avait déjà “répondu” et que (je la cite) que “les familles de victime sont en droit à ce jour d’obtenir un jugement dans un délai raisonnable”. On connaît la suite…
- Lors de la 2ème contre-expertise, Airbus a fourni des essais de Pitot qui selon lui permettent d’affirmer que la Pitot AA résistait finalement mieux que les BA et les Goodrich. Si cela s’était limité à cette incongruité dans laquelle Airbus a été juge et partie, cela n’aurait pas été trop grave ; le problème, c’est que cette pièce a permis en grande partie au JI Aubertin de l’époque de prononcer un non-lieu.
- Et puis, cette insistance à vouloir nous faire croire qu’il suffisait de suivre l’horizon artificiel pour s’en sortir m’a vraiment semblé suspicieux et bien trop simpliste. D’ailleurs, comment être certain de savoir ce qu’avait vraiment les yeux le PF puisque les instruments du côté droit ne sont pas enregistrés !?
- Le manque d’indépendance de certains experts judiciaires avec les personnes mises en examen a beaucoup choqué les parties civiles et nous pensons que c’est un point qu’il faudrait améliorer pour les futures enquêtes judiciaires (présence par exemple d’un officier de la Gendarmerie des Transports Aériens).
- Nous n'accordions pas une totale confiance au BEA puisque son ministère de tutelle était le ministère des transports. Le BEA n’a pas enquêté sur les facteurs humains et nous avions le sentiment qu’il ne voulait pas mettre en difficulté Airbus.
- Du côté des politiques, le secrétaire d’état au transport Dominique BUSSEREAU, dans un langage particulièrement menaçant à notre égard n’avait pas apprécié que l’association exige en novembre 2009 l’indépendance du BEA (« vous allez avoir des problèmes si vous continuez de m'e… avec ça !»).
- Que penser également de son chef de cabinet Marc HAMY qui après son départ du ministère des transports a occupé le poste chez Airbus de vice président « Airbus ProSky » ?
- Le 8 juin 2011, son successeur Thierry MARIANI affirmait dans le journal l’Express que 95% de la faute du crash de l’AF447 incombait aux pilotes, et a affirmé quelques jours après aux familles de victimes qu’il n’avait jamais tenu ces propos !
- Pourtant, l’annexe 13 de l’OACI (Organisation Internationale de l’Aviation Civile) garantit l’indépendance des enquêtes menées par les Bureau d’Enquête et d’Analyse (BEA).
- L’association n’a donc jamais été convaincue que les autorités feraient toute la lumière sur les raisons de la disparition de nos proches ; notre détermination, voire notre entêtement à rechercher la vérité est en fait la conséquence de cette situation.
Cela m’amène donc à parler de la recherche de l’épave….
RECHERCHES DE L’EPAVE
- En août 2009, nous avons reçu du BEA des cartes indiquant la localisation des débris et des corps retrouvés au mois de juin. Mon attention s’est portée immédiatement sur des débris qui se trouvaient très éloignés de tous les autres. Ces débris nommés « 11.9 » sur la carte étaient situés à une dizaine de kms au nord du dernier point de localisation, alors que tous les autres étaient éloignés d’environ 50 kms depuis le dernier point de localisation. Ces débris 11.9 ont été dans les tous premiers à être récupérés ; je crois me souvenir qu’il s’agissait du 1er jour de la localisation des débris et des corps. Lorsque nous avons rencontré pour la 1ère fois le BEA en septembre, je leur en ai parlé, mais ils ne se souvenaient pas de ces débris. Lors de la réunion suivante, ils m’ont expliqué qu’ils avaient éliminé de leurs cartes ces débris car ils n’avaient pas pu valider leur localisation. J’apprendrai par la suite qu’il s’agissait de 3 petits morceaux de coffres à bagage et beaucoup plus tard, que ceux-ci avaient été trouvés par des pêcheurs locaux qui avaient pris le soin de noter leur localisation, via leur GPS.
- Je ne saurais pas vous expliquer pourquoi, mais j’ai eu très rapidement la certitude que l’épave était située sous ses débris.
- J’avais demandé au BEA de pousser la 3ème phase de recherche en 2010 jusqu’à ces débris, mais cela nous a été refusé, car le BEA nous a dit que l’US NAVY était déjà passé par là et qu’ils n’avaient rien trouvé. Quand nous avons demandé au BEA les enregistrements des « pings » de l’US NAVY, il nous a été répondu que l’US NAVY n’avait rien enregistré et qu’on pouvait s’adresser directement à l’US NAVY…
- J’ai compris à ce moment-là qu’il était inutile d’insister et que je devrai m’y prendre autrement pour convaincre d’aller voir sous ces débris si l’épave s’y trouvait
- Quelques jours après le début des recherches de la 4ème phase (ils sont allés directement sur ces débris !), le BEA m’a appelé au téléphone pour me prévenir qu'ils avaient localisé l’avion. Le BEA ne voulait pas qu’on apprenne l’information par les médias et souhaitaient nous réserver la primeur (c’est tout à leur honneur). Ils avaient eu raison de le faire, car 2 ou 3 heures plus tard, les premiers journalistes commençaient déjà à nous appeler.
- Je n’en veux pas au BEA pour ma part de ne pas avoir trouver l’épave plus tôt, même si comme vous pouvez l’imaginer, cette attente a été véritablement insupportable et douloureuse. Je pense qu’ils n'avaient pas imaginé que l’avion avait pu faire un ½ tour et que c’est pour cette raison qu’ils étaient convaincus que l’épave se trouvait bien plus au Nord.
- Des membres du BEA m’ont par la suite confirmé qu’on avait bien retrouvé l’épave au-dessus de ces débris « 11.9 » ; nous nous sommes rencontrés à 7 reprises avec le BEA, et à chacune de ses réunions, je leur ai parlé de ces débris.
- Pendant près de 3 ans, j’avais au fond de moi, même si cela peut vous paraître irrationnel, un infinitésimal espoir que mon frère était encore vivant. Le rapport d’autopsie reçu quelques jours avant noël 2013 (!) avait définitivement mis un terme à ce doute.
- Au- delà de la déclaration officielle quant à la véritable raison d’Airbus pour expliquer le financement en partie de la dernière phase de recherche, il me semble que cette découverte leur a surtout permis de mieux comprendre les failles de leur avion et en conséquence d’améliorer la sécurité dans la conception des suivants (ce qui est une très bonne raison !).
- ; Je regrette cependant qu’on ait pas voulu remonter les 3 Pitot pour les analyser ; comme la ministre des Transport Madame Kosciusko-Morizet avait déclaré dans les médias que les corps étaient intacts, en toute logique les Pitot devaient l’être également.
STATISTIQUES
- J’ai récupéré toutes les données dont les ASR, dans les rapports du BEA et du dossier judiciaire concernant les incidents de pitot et je les ai intégrés dans un tableau qui a été versé au dossier judiciaire. Il ressort de ce tableau des informations très intéressantes que je vais vous énumérer maintenant :
- Concernant les 10 ASR et l’accident de l’af447, on remarque :
- D’une part, que les 6 équipages qui ont eu le message NAV ADR DISAGREE appliquent la procédure IAS DOUTEUSES ; les 5 autres dont l’AF447 n’ont pas eu le message ou trop tard pour l’AF447 et n’appliquent pas la procédure IAS DOUTEUSES. En résumé, les équipages qui ont disposé du message NAV ADR DISAGREE ont appliqué cette procédure et ceux qui n’ont pas eu la “chance” de l’avoir ne l'appliquent pas. On voit bien que cette procédure ne pouvait pas suffire à empêcher un accident, et pourtant, cela a été quasiment la seule recommandation qu’a fait AIRBUS à Air France.
- D’autre part, la situation rencontrée par l’équipage était la plus défavorable d’entre toutes ; sans être exhaustif, ils ont eu : perte d’altitude virtuelle du fait de la série 200 de leur avion, message NAV ADR DISAGREE arrivé trop tard, ils étaient en vol de nuit sans repères visuels, au plus mauvais moment du cycle circadien (cad que les capacités cognitives de l’être humain sont au plus bas), 3 pitot bouchés (rarement le cas !), etc.
- Il me semble donc inimaginable de vouloir régler un défaut avec l’application de procédures. Il peut m’arriver dans ma fonction d’informaticien de le faire, mais c’est à titre provisoire, le temps de trouver une solution pérenne qui peut-être le remplacement d’un équipement.
L’INFORMATIQUE EMBARQUEE
- Comme je l’ai précisé précédemment, je suis ingénieur en réseau informatique et au fur et à mesure que je découvrais cet avion, je me rendais de plus en plus compte des nombreuses similitudes avec ma fonction d’informaticien. Ces avions s’articulent autour de systèmes redondants à 3 éléments dans une architecture très informatisée ; on retrouve des équipements similaires dans les Data Center.
- Dans ma fonction, la qualité des informations qui me sont communiquées par les systèmes est absolument déterminante pour identifier l’origine d’un problème. Une seule information fausse peut suffire à provoquer un effet tunnel qui va retarder le dépannage de manière importante ; cela peut aller de quelques minutes à plusieurs heures suivant la complexité de la panne.
- pour faire la comparaison avec l’AF447, les pilotes n’ont disposé que d’une poignée de secondes pour identifier l’origine de leur problème, mais avec une multitude d’indications fausses et inutiles ; sans que cela exhaustif on peut citer :
- Les Indications à l’ECAM quasiment toutes sans intérêt qui ont neutralisé le travail du PNF car pratiquement chaque message ECAM nécessite l’application d’une procédure ; j’aurais bien voulu qu’on m’explique comment un pilote procède quand il dispose de 2 secondes pour lire et interpréter un message, aller chercher dans le manuel la procédure, la lire, la comprendre et la faire appliquer à son collègue ? et il y’a eu 24 messages à l’ECAM en moins de 5 minutes…
- Et du coté PF :
o Altitude fausse (même si cela n’a duré que quelques secondes)
o FD qui incite à cabrer
o Vitesses fausses ou absentes
o L’alarme Stall fonctionne à l’envers
o Etc.
- Et en même temps, l’avion ne leur dit pas que les pitot sont bouchés, ils ne disposent pas non plus d’indicateur d’incidence qui aurait pu assurément les aider, bref les informations dont ils disposent ne sont ni fiables et ni pertinentes. Dans ces conditions, je ne vois pas comment les pilotes auraient pu distinguer les bonnes indications des mauvaises ?
- Je me suis comme beaucoup de professionnels posé la question si j’aurais fait mieux. A leur place, j’aurais été moi aussi assurément incapable de comprendre ce qui était en train de se passer sur cet avion dans un délai aussi court et donc maintenir ma trajectoire, faute d’informations fiables.
- En 40 ans de carrière, je n’ai jamais connu de système informatique qui ne bugg pas.
; en effet, au-delà du vieillissement des composants, il faut se rendre compte qu’on applique régulièrement des mises à niveaux de ces systèmes informatiques. C’est par exemple, les PHC et les FWC (Flight Warning Computer) qui ont été modifiés sur l’AF447 1 an avant. Les PHC gèrent la chaîne de dégivrage et les FWC des indications (alarmes et alertes) qui sont communiquées aux pilotes.
Autrefois, les constructeurs ou éditeurs informatiques ne sortaient des mises à jour qu’après avoir réalisé des analyses extrêmement poussées, ce qui fait qu’il était rare de rencontrer des problèmes quand on appliquait ces mises à jour. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas, et je dois faire de plus en plus souvent face à des bugg. En d’autres termes, je réalise les tests de qualité à la place du constructeur.
Dans l’AF447, il n y’a eu aucune analyse de sécurité concernant le changement des FWC alors que celle-ci était pourtant obligatoire ; ils ont été remplacés sur l’AF447 en même temps que les PHC). D’ailleurs, Il n’ y a pas eu non plus d’analyse de sécurité sur ces PHC, mais là ce n’était pas obligatoire car je suppose que cela tient au fait que la qualification de perte de vitesse est seulement de MAJEUR.
- J’ai malgré tout pu constater que l’automatisation a permis de réduire de manière très significative le nombre de pannes ces dernières années ; cela se concrétise pour le secteur aéronautique par une diminution considérable du nombre d’accidents, mais avec pour contrepartie, une complexité de pannes nettement plus importante. -> nécessite plus de temps d’analyse
- Ce 1er juin 2009, l’homme et la machine disposant des mêmes données fausses, ils ont été en symbiose ; dans l’erreur d’interprétation pour l’équipage et dans le traitement des données pour les calculateurs ; je pense que l’avion et les pilotes considéraient que l’avion était en descente, d’où les ordres à cabrer, amplifiés sans aucun doute par l’informatique embarquée ; le piège se referme alors inexorablement sur l’équipage.
- Par ailleurs, les pilotes ont dû combattre une machine qui a toujours le dernier mot puisque ses systèmes défaillants sont toujours bien présents et continuent d’interagir sur les commandes de vol. En résumé, les pilotes ont dû s'adapter à la machine, et non l’inverse, ce qui n’est absolument pas logique. Je ne comprends pas pourquoi Airbus n’a pas prévu de sortir de la boucle tous les calculateurs en lien avec le dégivrage, et fournir aux pilotes des instruments et indicateurs basiques, mais indépendants de ses systèmes pollués par de fausses données. Quand mon réseau va mal, je m’en remets à des outils simples ultra fiables après avoir éliminé tous les équipements défaillants. Pourquoi ne fait-on pas ça dans ces avions ?
- PITOT
- J’ai lu dans le dossier judiciaire ou un rapport du BEA que la vérification de l’état des pitot lors des opérations de maintenance (Check C) se limitait à un simple examen visuel de la sonde. J’espère que cette manière de vérifier l’état des sondes a été améliorée depuis le crash de l’AF447 car je ne vois pas très bien comment cette méthode peut être efficace ; le diamètre du trou étant très fin, je ne suis pas certain qu’on puisse se rendre de compte véritablement de l’état de bouchage d’une sonde) !?
- Avec 1 Pitot bouchée, le risque d’accident est extrêmement faible du fait que la sonde défectueuse va sortir de la boucle ; avec 2 Pitot bouchés, l’issue du vol dans de bonnes conditions devient un peu plus hasardeuse ; mais avec 3 Pitot bouchés, cela revient à jouer à la roulette Russe car cet avion n’est pas conçu pour avoir 3 Pitot HS en même temps. Selon moi, en refusant d’admettre que la perte des vitesses pouvait être Catastrophic, Airbus a favorisé la probabilité de ce crash.
- Le 2 octobre 1996, un Boeing 757 assurant le vol AeroPerú 603, s’est écrasé dans l’océan Pacifique, avec aucun survivant. L'enquête conclut qu'un technicien de maintenance n'avait pas enlevé le ruban adhésif protégeant les sondes Pitot avant le décollage. Volant au-dessus de l'eau, de nuit et sans aucune référence visuelle, les pilotes n'ont pas eu conscience de leur véritable altitude et n'ont pas réussi à garder le contrôle de l'avion, alors que les instruments de bord leur indiquaient des valeurs incohérentes et qu'ils étaient confrontés à des alarmes contradictoires, à savoir décrochage et survitesse en même temps ; J’ai écouté le CVR sur internet de l’AeroPeru 603 et j’y ai trouvé une extrême similitude avec le CVR de l’AF447, à savoir un équipage complètement désorienté par la présence d’indications contradictoires et fausses.
- Pas le même avion, mais les mêmes conséquences ! Cet accident m’amène à revenir à la
- FIABILITE DES INFORMATIONS ET QUALIFICATION DE LA PANNE
- La réglementation CS25 insiste énormément sur le caractère catastrophique que peuvent revêtir des indications fausses qui sont communiquées à l’équipage.
Boeing en décembre 2012 a fait une requête auprès de la FAA pour rétrograder la perte des vitesses considérée comme « catastrophic » aux USA. La FAA a refusé de donner une suite favorable à Boeing en s’appuyant sur plusieurs textes ( Advisory Circular (AC) 25-11A de juin 2007, AC 25.1309-1A de juin 1988, recommandation de sécurité du NTSB A-07-56 de septembre 2007)) ; la FAA a particulièrement insisté sur le risque de perte de contrôle de l’avion par l’équipage tout en précisant que cela s’était déjà produit. Au vu de ces éléments, la FAA a maintenu l’Unsafe Condition et donc le caractère Catastrophique engendré par les pertes des vitesses.
- Airbus dans une audition réalisée lors de la 1ère expertise a confirmé qu'il était l'initiateur de la qualification "MAJOR" de la perte des vitesses.
- Je considère que c’est une aberration car au-delà de l’avis de la FAA, comment est-il-possible d’une part de considérer que les indications communiquées aux pilotes revêtent un caractère « Catastrophique » et de considérer en même temps que la perte de vitesses qui va générer ces fausses informations seraient simplement « Majeur » !? Ce n’est tout simplement pas logique !
- J’ai entendu Airbus lors de ce procès le 6 octobre affirmer que la FAA considère que la perte des vitesses est MAJEUR aux Etats-Unis ; c’est peut-être vrai aujourd’hui mais cela ne l’était pas au vu de ce que je viens de dire, jusqu’au moins en 2012.
Concernant la corrosion en lien avec l’audit Thales de 2004, il faut prendre en compte 2 éléments très importants :
- Tout d’abord, il convient de préciser que l’oxydation est un très mauvais conducteur thermique ce qui a pour conséquence une diminution de sa capacité de dégivrage. Deuxièmement, la corrosion réduit le diamètre interne de ce tube car cela crée des boursouflures à l’intérieur et cela va modifier la capacité de l’air à s'écouler à l'intérieur du tube ; en conséquence la précision de la mesure va être affectée et donc fournir des informations fausses de vitesses.
- Pour ce qui est de l'oxydation des sondes immergées pendant 2 ans, il est probable que le milieu marin (chlorures) ait contribué à une aggravation des dommages. Toutefois, la partie endommagée en usage normal est l'intérieur du tube, et le mécanisme de dégradation est de type corrosion sèche à haute température, très différent d’une corrosion liée à un environnement humide.
- Une expertise de ces sondes immergées aurait certainement pu confirmer une dégradation importante de la partie interne du tube due à la corrosion en milieu sec et Il est donc extrêmement regrettable qu’on n’ait pas remonté ces sondes après la découverte de l’épave.
On sait également que la Pitot AA a une durée de vie de 10.000 heures (de vol) et que l’avion de l’AF447 comptabilisait près de 19.000 heures de vol au moment du crash ! L'audit de 2004 sur une AA de 10.000 heures a montré d'importantes boursouflures du métal. Le même test réalisé avec la Goodrich a montré que la sonde n'avait pratiquement aucune déformation du métal. Sans trop rentrer dans la technique, la différence de durabilité entre les 2 sondes provient de la méthode de fabrication du revêtement métallique, notamment de l’épaisseur et du procédé de nickelage mis en œuvre par Thalès ; il est de type électrochimique pour la Thalès, et chimique pour la Goodrich ; la Thales est donc moins efficace dans la durée que celle de la Goodrich ; en d’autres termes, la Thales AA certifiée en 1998 n’est qu’une mauvaise copie de la Goodrich ! Je précise qu’une bonne partie de ces informations m’a été communiquée par un expert en matériaux.
Il se trouve que j’ai été également en contact avec un salarié de Thales qui travaillait sur le site de Vendôme, dédié à la fabrication des sondes Pitot. Il m’a appris que la sonde avait été fabriquée selon un cahier des charges qui provenait de l’extérieur. Il n’a pas voulu me communiquer le nom du donneur d’ordre mais je me suis douté de qui il s’agissait.
En résumé, il suffisait de remplacer les Pitot AA par des BA ou des Goodrich pour que cet accident n’ait pas lieu, même des Thales AA neuves auraient fait l’affaire.
J’en ai fini avec l’audit Thales de 2004, mais pas encore tout à fait avec les Pitot…
- Je trouve dommage que l’enquête technique sur les PHC n’ait pas été poursuivi par les experts de la contre-expertise, car il existe une forte présomption que la modification des PHC réalisée 1 an avant le crash sur l’AF447 a été le point de départ de la recrudescence des incidents de Pitot ; en d’autres termes, je pense que c’est la combinaison Pitot AA avec les nouveaux PHC qui a provoqué le crash de l’AF447 ; il suffisait donc d’éliminer une de ces 2 causes, pour que l’accident n’arrive pas, sachant que la solution la plus simple et la plus rapide aurait consisté à interdire la Pitot AA.
- Pour ma part, j’aurais privilégié un mixage de Pitot de différents types pour une réelle redondance et surtout, de ne pas attendre qu’elle tombe en morceaux pour les remplacer ; dans un DataCenter, on remplace les matériels en préventif avant leur fin de vie annoncée ; je ne comprends pas qu’on ne le fasse pas avec un équipement aussi critique que les Pitot !
- Conclusion
- En conclusion, c’est Airbus qui connaît le mieux son avion puisqu’il en est le concepteur, et pourtant il ne va pas faire procéder au remplacement des Pitot AA !? Pour moi, cela reste encore aujourd’hui un véritable mystère.
- Par ailleurs, l’informatique dans cet avion n’était pas encore vraiment aboutie et suffisamment fiable pour s’en remettre uniquement à elle (vieux processeur des années 80, vieille techno). J’ai le sentiment qu’Airbus a appris la leçon et fabrique aujourd’hui des avions plus sûrs. L’IA pourrait peut-être même dans l’avenir apporter plus de sécurité, non pas pour remplacer l’équipage mais pour l’aider à déterminer l’origine d’un problème complexe comme celui de l’AF447. Un cerveau humain normalement constitué ne sera jamais assez performant pour remédier à un tel problème dans un délai aussi court.
- Depuis cet accident, je ne prends plus l’avion depuis que je sais que leur informatique embarquée est véritablement le seul maître à bord.
- Nous sommes le 1er juin 2009, il est environ 11h30 du matin, quand mes parents m’appellent au téléphone et me disent : « Ton frère est dans l’avion… ». Mes jambes se dérobent sous moi et le cauchemar va alors durer 16 ans ; j’espère que cette dernière étape à savoir ce procès me permettra d’y mettre fin…
Je vous remercie de votre attention.
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